mardi 9 février 2010

Eux, la terre de la lamentation




Hors de tous les contextes , hors des sentiments, des nostalgies ou des chagrins, loin de toute passion et de tout amour, dans une terre martienne, sans vents, sans pleurs, sans chants, sans âmes, sauf celles de la désolation, le soleil meurt continuellement, laissant une mer en ébullition permanente. Entre ces sables et ces monts existe un peuple de moribonds. Un peuple sale et sans dignité, petit et désargenté. Sans éclat, sans voix, nu de toute humanité. Il y avait cet homme; cheveux noirs, yeux noirs. Et sa peau cuivrée et terreuse recouvrait son hémisphérique ventre mouillé qui se jetait sur ces pattes courtes et grosses. Il y avait cet femme; ses cheveux couleur brai et ses yeux colophane, muette et aveugle. Un kilomètre plus loin une autre était ronde et grasse; un buisson de cheveux agonisants se dressait au-dessus de sa tête. Son regard inintelligent et passif fixait la mer verte, marron et merde dont l'écume, son foutre impuissant, se jetait sur les rivages de cette terre ingrate. Un homme plus bleu que nègre; de ses cheveux crépus pendaient des branches et des capsules de bière.

Ils étaient des millions, tous infâmes, tous sentaient l'oignon et le sel, tous nains, tous juifs, tous sodomites, tous nègres, tous putains. Ils se tenaient par la main. Ils enfonçaient leur orteils monstrueux dans le sable ardent de leur plage. Les montagnes, joviennes, méprisaient leur dos. L'astre roi les foutait furieusement. Eux, la multitude affamée et silencieuse implorait la mer arrogante et fiévreuse.

C'était la terre de la lamentation, et Eux les bâtards de la misère et l'océan.









Crédit Image : Françoise Nielly, www.francoise-nielly.com

Larmes de Crocodile





Les terres émergées sont recouvertes en grande partie de faim, de crasse, de larmes et de désespoir. La vérité du monde est qu'il est un océan de pauvres.

Les haïtiens, pauvres parmi les pauvres, nègres parmi les nègres, damnés parmi damnés ont été traités avec empire par cette Terre jovienne, impérieuse et indolente. La toute-puissance de la Terre nous ramène à cette condition, toujours humiliante, d'hommes désarmés, de mortels face aux dieux. Sans doute, cette condition de faiblesse et d'impuissance face aux caprices de Gaia nous rend, aussi, plus attentifs aux malheurs de ceux qui partage nos traits . Ainsi, l'opinion publique des pays riches, découvre le 12 janvier dernier avec une tristesse, qu'il conviendrait de voir comme sincère, les ravages causés par le tremblement de terre à extrémité occidentale d'Hispaniola. C'est, en effet, ce seul facteur de l'opinion de la bienpensante classe moyenne des pays qui sont, que l'on veuille ou non, les maître des monde, qui décide du malheur d'autrui. La hiérarchie des faims, le degré de l'infamie, le calcul des larmes, la somme totale de tristesse, l'importance de l'horreur forain sont toujours laissés aux soins des jugent téléspectateurs.

Le comportement d'un être normalement constitué face aux désastres qui touchent de manière naturelle les hommes est assez fortement prévisible. Néanmoins, le nombre et la force des vagues de cet océan de misère qui entourent les nantis de cette île industrielle, obligent ces derniers à être volages en solidarité, indisciplinés en compassion.

Les voix politiques sont d'autant plus méprisables qu'elles sont cyniques et calculatrices, elles racolent le moutonnement des foules électrices et larmoyantes. L'action politique est peut être d'autant plus fautive qu'elle agit en trompe l'oeil. Pour le cas haïtien, les États-unis ont certes été présents, mais l'aide européenne était de 430 millions d'euros, soit 4 fois plus importante que la contribution américaine. Le mutisme d'Ashton et les logorrhées de Clinton sont tout aussi lamentables, avec une mention spéciale pour la première.

Lorsque l'horreur est général, lorsque la misère imbibe la condition humaine où qu'elle se trouve, l'affolement des oracles de l'opinion est infâme, les larmes de l'opinion sont innécessaires.




Photo : Markus Bollingmo, www.markusbollingmo.com

La cuisse de Jupiter et les agences de notation



Il n'est jamais sans intérêt de lire plusieurs journaux. Il est par exemple, assez drôle de lire les articles du journal de référence péruvien, El Comercio et du journal français, réputé de gauche , Libération sur les agences de notation. Dans la réalité péruvienne, les trois grandes agences de notation (S&F, Moody's, Fitch) qui ont élevé la notation de l'économie péruvienne plusieurs fois entre 2008 et début 2010, passant de speculative à medium risk, consacrent les efforts faits par trois gouvernements péruviens successifs. La réalité européenne est toute autre. La Grèce, et sans doutes les autres PIIGS1 par la suite, a vu sa notation baisser à BBB+ . Dans la réalité européenne, dans cette Europe dont les penchants mercantilistes et interventionnistes ont peine à s'effacer, l'idée que l'on ne puisse pas engrosser impunément les dettes publiques, qu'on ne puisse pas faire du contribuable l'otage des délires politiques, qu'on soit, en somme, responsable de ses actes parait extravaguent. Europe, Europe, toujours si hautaine, si intimement convaincue d'être dégagée de l'empire des lois, par son grandiose legs à l'histoire de l'univers.


Il est tout à fait inacceptable qu'une nation européenne, aussi irresponsable soit-elle, ait à rendre compte à une quelconque agence de notation du nouveau monde barbare. Il est immoral que des pays comme la France paie le même tarif que des pays de ce tiers monde nègre et sale, compte tenu de l'apport du pays de Jean Baptiste Say et de Frédéric Bastiat au monde. Ces agences de notation ne sont valides, nécessaires pour le finance mondiale et légitimes que si elles notent avec les honneurs qui leur sont dus les aristocratiques, antédiluviennes et augustes nations de ce coin du monde.


Si problème il y a dans l'économie mondial, les agences de notation sont loin d'être prioritaires.




1 Portugal, Italy,Ireland, Greece and Spain.